***reportage réalisé à mes 18 ans***
Calais fait partie du visage politique français depuis plus de 30 ans. Entre immigration et nationalisme, la ville est désormais divisée. La population désabusée se retrouve au milieu d’une guerre d’influence politique. Alors que les associations présentent sur place alarment sur la situation dans la région, le gouvernement fait preuve d’une inaction surprenante.
Entre descente de police à l’aube, lacérage des tentes et violences répétées, l’espoir est dur à entretenir.
Alors que la crise migratoire bat son plein, que chaque jour de nouveaux exilés arrivent en France, le gouvernement n’assume pas son rôle de “pays d’accueil”, qui lui ai pourtant imposé par l’Union Européenne, pour ces milliers d’hommes, femmes et enfants présents sur le territoire.
La situation dans le Calaisis est d’une gravité extrême. Des milliers d’exilés du Moyen-Orient et de l’Afrique se retrouvent bloqué. Chaque jour, ils tentent la traversée de la Manche, parfois aux prix de leurs vies. Après des mois de marche, à fuir des pays où ils n’ont plus rien, les réfugiées doivent lutter pour survivre.
La présence d’exilés dans le nord de la France ne date pas d’hier. En 2007, le gouvernement français recensait 160 000 exilés dans le Nord-Pas-de-Calais. Aujourd’hui, les chiffres ont évolué, sans pour autant dévaluer la gravité de la situation. Au 4 juin 2021, 1500 réfugiées étaient recensées à Calais, prisonniers d’un pays “eldorado” qui s’est transformé très vite en enfer.
Malgré les gouvernements successifs, aucune amélioration.
Pousser à vivre dans la banlieue de Calais à la suite des arrêtés de la mairie, les exilés se cachent. Parfois derrière un bosquet, sous un pont ou prêt d’une route. Ils restent dans leurs campements de fortune afin d’éviter tout contrôle de la part de la police.
Il est donc de plus en plus difficile, pour eux, d’accéder aux ressources de premières nécessités. Les associations organisent des “rendez-vous” qu’il ne faut pas rater. Un jeune réfugié afghan raconte “Tu vois… Je ne peux pas me permettre de le rater, les associations, elles nous aident, elles sont là pour nous “.
Depuis le 11 septembre 2020, les collectifs d’aide n’ont plus le droit de distribuer des produits de première nécessité dans le centre-ville de Calais, la COVID-19 a permis de “justifier” ce qui constitue le 11e arrêtés en vigueur.
Alors que les aides extérieures se font rares, les associations se retrouvent isolées. Beaucoup ont arrêté de distribuer de la nourriture, ayant été verbalisés à de nombreuses reprises. L’État subventionne très peu d’association, l’une d’entre elle “Vie active” n’a pas assez de champs d’action pour aider les exilés du Calaisis.
Des expulsions qui se répètent chaque jour.
Bien qu'en minorité, les femmes et les enfants subissent le même sort que les hommes présents à Calais. Les enfants n’ont pas d’accès à l’éducation et grandissent dans un avenir incertain. Pourtant, l’État ne fait rien pour eux.
967, c’est le nombre d’expulsions faite par la police française en 2020. Chaque 48 heures, des camps sont démantelés, des tentes et des affaires sont réquisitionnées. Hommes, femmes et enfants perdent ce qu’ils avaient pu protéger depuis leur arrivée en Europe.
La vie quotidienne est difficile, il n’y a aucune chance de s’installer dans un lieu sûr. La stratégie dès 48 heures permet d’éviter tout point de fixation, dans le but d’endiguer la création d’une nouvelle jungle. Les hangars de l’Impasse Magnésia, qui accueillaient une centaine d’exilés dans la banlieue de Calais, ont été démantelés en juin 2021, par ordre du président de la région, Xavier Bertrand.
Cette expulsion est, sur les deux dernières années, la plus forte jamais recensé.
Des centaines d’exilés se sont alors retrouvés sans abris, alors que la période des fortes chaleurs arrivait. Début juin 2021, plus de trente-et-un CRS ont été blessés lors d’affrontement. L’été a sonné comme le regain d’une violence qui semblait perdue entre la police et les exilés.
La peur incessante de se faire frapper, gazer, humilier…
Créé en 2017, le projet “Human Rights Observers” a pour but de recenser tout abus sur les droits humains. Les chiffres sont édifiants. Selon “Refugee Rights Europe”, plus de 92 % des migrants présents à Calais et sa région ont subi des violences policières. (Rapport Auberge des Migrants - 2017).
D’après HRO, les actes violents se multiplient : policiers urinant sur des migrants, cris de singe, descente dans les camps et utilisation de la violence sans raison. Les migrants vivent de la confiance qu’ils ont entre eux. Souvent réunis par origine, ils s’entraident et organisent des collectes de nourriture et d’eau.
Une vie quotidienne bien éloigné de ce que l’on pourrait attendre au sein du pays des droits de l’Homme.
Sadim vit près du stade de l’Épopée, un lieu mythique pour les calaisiens. Le camp est uniquement constitué d’Érythréens.
D’un côté, les tentes sont installées en bordures de route, dans l’obscurité. De l’autre, lui et ses compagnons ont réuni des chaises, des tables afin de se regrouper et de parler. Certains utilisent leurs téléphones pour communiquer avec les familles, d’autre discutent et jouent aux cartes.
Sadim explique que plusieurs de ses compagnons sont partis chercher de l’eau à quelques centaines de mètres du camp, près d’un bidon installé par une association.
Ces compagnons nous invites à revenir le lendemain, persuadé que la police sera là, à l’aube.
Cela n’a pas manqué, le lendemain matin, les CRS étant présents en masse sur le camp.
Dans ce voyage, Adam à tout perdu. Le camp d’Adam se trouve à Coquelle, sur un champ en friche à quelques mètres de la route. Vivent là-bas, six hommes, tous venant du Soudan.
La police est passée il y a quelques jours, ces derniers ont pris tout ce qu’ils trouvaient.
Un ami d’Adam traduit : “Je suis là depuis huit mois, je n’en peux plus”. Je me suis fait frapper à plusieurs reprises, les policiers français viennent tous les jours. On ne vous veut pas de mal, nous ne sommes pas violents. Nous fuyons la guerre.”
Adam fait référence à la nuit passée, des policiers sont venus et leurs ont dit de partir avant la matinée. Ils sont à bouts, les arrestations et les démantèlements surviennent tous les jours. Leurs quotidiens est le même : fuir et subir.
Les saisies, le fléau calaisien.
Le rapport de HRO annonce que plus de 2600 tentes ont été saisies depuis janvier 2021. Ces tentes représentent la vie de milliers d’hommes et femmes. Nombreux y cachent leurs téléphones, leurs nourritures et leurs vêtements. Les tentes sont le plus souvent découpées au couteau et misent dans des camions affrétés par les CRS. Résignés, les exilés finissent par partir tous les matins, se cacher et se réinstaller plus tard dans la journée. Pourtant, toutes ces saisies de tentes sont illégales.
Le rapport du 23 octobre 2017 de l’IGGN/IGPN et l’IGA stipule que “rien ne permet, en revanche, d’empêcher ces personnes de récupérer leurs affaires, qu’elles s’éloignent du lieu de l’intervention ou qu’elles soient interpellées”. En hiver, les exilés se retrouvent sous -3/-4 degrés et surtout, ils ne sont pas relogés. Les centres d’accueil sont inadaptés, les associations telles que “L’Auberge des Migrants” n’ont pas la capacité d’accepter autant d’exilés.
La COVID-19 a rendu la vie des exilés de Calais très difficile. Victimes de la politique de “non-fixation”, ils se sont retrouvés en première ligne de la pandémie. L’accès aux services de santé y ai déjà difficile.
Un seul objectif, l’Angleterre.
Par tous les moyens, ils tentent leurs chances. Les bateaux, récupérés par les passeurs, ne sont que des cercueils flottants. Pour beaucoup, les traversées échouent et c’est alors l’économie de toute une vie qui part en fumée.
“En Iran, je n’ai plus rien. Je risque de mourir tous les jours, là-bas, c’est la pauvreté. Il n'y a pas de travail, on ne fait rien. Moi, j’ai fait des études, j’arrive, il n’y a pas de travail. Je fais quoi moi ? J’ai des amis là-bas (Angleterre), ils vivent bien ”.
Nous rencontrons Elias sur le port de Calais. Il reçoit un coup de téléphone, c’est le passeur : “ Ce soir ? Ok, je serais là, combien veux-tu ?”. Elias confie qu’il va tenter sa chance, c’est ce soir ou jamais.
Beaucoup d’associations sont à la recherche de bénévoles, n’hésitez pas à les contacter si vous voulez aider. Quelques noms pour vous renseigner : Utopia 56, L’Auberge des Migrants, Refugee Calais Kitchen…